J'ai appris bien des choses en jouant à Formata. Par exemple que, né à Rome deux mille ans plus tôt, j'aurais fait un très mauvais général. Mais aussi que tout ce que je croyais avoir appris dans Astérix était faux. Tortue, quinconce, tout ça c'est des conneries : pour gagner une bataille, il faut rusher comme un goret affamé et capturer des points de contrôle. Si Vercingétorix l'avait su, toute la face de l'Europe en eût été changée. Mais je digresse, je digresse, et je ne vous ai toujours pas dit ce qu'est Formata. Il s'agit d'une sorte de jeu de tactique minimaliste, dans lequel on envoie des unités (quatre pour le moment : infanterie, archer, porteurs de bannières et ingénieurs) fracasser celles de l'ennemi sur une petite carte inspirée d'une bataille célèbre, comme celle des Thermopyles ou le siège d'Alésia. Si l'on ne dispose au début de chaque bataille que d'un petit nombre de soldats, on peut en produire d'autres en envoyant ses troupes capturer les fameux points de contrôle, sortes d'obélisques qui, chaque seconde, rapportent une grosse poignée de ressources à leur propriétaire. Bien sûr, l'ennemi va tenter d'en reprendre le contrôle, c'est pourquoi il voudra les défendre efficacement, en prenant le contrôle de ses unités.
Transformé en archive gratuite
- Cet article, initialement réservé aux abonnés, est devenu gratuit avec le temps.
Formata
Thermopyles rechargeables
Il y a six jours, la tête d'un monsieur est apparue dans mon Skype – ce qui m'a fait très peur car je n'ai pas l'habitude et que j'avais à peine eu le temps d'enfiler un pantalon – et m'a posé des questions sur les liens entre histoire et jeu vidéo. Par exemple : « Est-ce que le jeu vidéo peut être un outil pour l'apprentissage de l'histoire ? » Comme je suis journaliste spécialisé et bien élevé, j'ai répondu que oui oui bien sûr, par exemple CivilizationEDU, la version de Civilization V destinée aux écoles américaines. « Cela permet aux enfants d'avoir une approche expérimentale de l'histoire, de tester les conséquences de décisions politiques ou économiques », je lui ai dit, car je peux avoir l'air très sérieux, surtout quand j'ai réussi à enfiler mon froc à l'endroit.
Centurion 21. Voilà la « fonctionnalité qui tue », comme on dit en bon français vu que Kalash surveille. Il est possible à tout moment d'incarner n'importe laquelle de ses unités, en vue à la troisième personne, afin de micromanager les combats comme un bon petit décurion. Établir une ligne défensive solide, bouclier contre bouclier, pour tenir face à la charge de l'ennemi. Ordonner aux copains de foncer dans le tas à la faveur d'une ouverture (« suivez-moi », « chargez ! », « attendez ! », les ordres disponibles ne vont pas chercher bien loin mais font le taf). Le joueur qui prête attention à la discipline et attaque de façon rangée est presque sûr de l'emporter. Mais il faut en même temps repasser, sans cesse, à la vue tactique pour donner des ordres aux autres unités, au pathfinding désastreux. Vérifier la progression de l'ennemi sur le reste de la carte. Acheter des améliorations. Prévoir de quoi défendre son camp et investir celui de l'ennemi. La moindre inattention peut coûter très cher, remonter la pente est quasi impossible et l'ergonomie, elle aussi, date de 52 avant notre ère. Les escadrons, qui se déplacent comme un seul homme, se forment par exemple de façon automatique, en plaçant à proximité des unités d'un même type. Sauf quand l'un des guignols décide sans raison de partir en vadrouille. Ou qu'une unité lointaine décide subitement qu'elle appartient désormais à cette escouade qu'elle n'a jamais croisée. Formata a des arguments à faire valoir mais, en l'état, il ressemble plus à une note d'intention qu'à un véritable jeu.