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Final Fantasy XV
Je suis une bande de jeunes
Du haut de notre tour d’ivoireNote : 2, nous portons envers la série Final Fantasy un regard légèrement amusé et teinté d’une grosse dose de mépris. Il faut dire que par chez nous, on aime bien les épées bâtardes de douze mètres et les univers steampunk avec des dirigeables qui ressemblent à des dragons, mais un peu moins les combinaisons en cuir et les héros tr0 d4rk sponsorisés par une marque de gel coiffant effet « saut du lit ».
Note 2 : Faute de budget, notre « ivoire » est en réalité un alliage très particulier constitué d’une centaine de boîtes du jeu Söldner, de quelques Windows Phone appartenant à Casque Noir et d’une poignée de cadavres fumants d’attachés de presse stagiaires pour le liant.
Note 2 : Faute de budget, notre « ivoire » est en réalité un alliage très particulier constitué d’une centaine de boîtes du jeu Söldner, de quelques Windows Phone appartenant à Casque Noir et d’une poignée de cadavres fumants d’attachés de presse stagiaires pour le liant.
Ce froid matin d’octobre, il fallait pourtant un sacrifice, une âme noble et pure qui irait jouer à Final Fantasy XV pendant quelques heures. J’ai eu beau faire mon maximum pour prouver que mon âme n'était clairement pas noble et encore moins pure, impossible de me détacher de ma condition d’« expert du Japon dès qu’on dépasse Shogun Total War ». J’ai donc été dépêché sur place pour évaluer les dégâts. « Les dégâts » oui, puisqu’on parle quand même d’un développement étalé sur une décennie et deux générations de consoles – tellement chaotique qu’il a sa propre page Wikipedia (voir notre lien à la fin de l’article) – en forme de grand jeu de chaises musicales où toutes les huiles de Square Enix sont venues apporter leur pierre instable à l’édifice branlant. Après les présentations E3 pas très alléchantes et l’immonde « Platinum Demo » diffusée par le studio il y a quelques mois, l’histoire de Final Fantasy XV aurait dû se conclure par un accident industriel de type Hindenburg, avec une grosse explosion pleine de flammes et de pleurs. L’histoire ne dira pas si Square Enix a organisé cette session de jeu pour rassurer la presse mais le résultat est étonnamment convaincant. Je me voyais déjà utiliser ces deux pages pour me moquer de FFXV en rigolant très fort mais figurez-vous que me voilà bien attrapé puisqu’après quatre heures manette en main, j’ai une terrible envie de continuer ma partie.
« For fans & first timers ». « Pour les fans et les petits nouveaux », dans la langue de Maître Gims : c’est sur ces mots que démarre cet épisode et on serait presque tenté de lui donner raison. Au-delà du menu Maxi Best of de coupes de cheveux débiles, de continents aux noms imprononçables et de méchants portant dix-sept écharpes simultanément, on trouve un Final Fantasy étonnamment moderne, qui pioche sans vergogne dans son propre patrimoine, mais aussi beaucoup chez la concurrence. Les combats, par exemple, prennent un sacré coup de jeune avec des affrontements en temps réel (du calme, il reste une simili-pause active pas trop mal foutue) où l’on dirige uniquement son héros tout en donnant vaguement quelques ordres à ses copinous. L’importance du placement, des esquives et du timing entre les membres de l’équipe rappelle fortement la série des Xenoblade et donne à ce FF un fumet de nouveauté pas désagréable. Il sera encore meilleur quand les combats gagneront en profondeur tactique (espérons plus tard dans l’aventure) et que la caméra aura dessaoulé (espérons avant la sortie du jeu). Mais il n’y a pas que dans ses bastons que FFXV bouscule ses habitudes : son monde ouvert, même s’il est apparemment voué à se refermer dans la deuxième partie de l’aventure, rappelle l’étrange Final Fantasy XII et son côté MMORPG offline. Je ne compte plus les monstres géants sortis de terre avec une épée en feu, forçant nos compagnons d’infortune sous-équipés à courir comme des dératés pour éviter de se faire flamber le fessier.
Trafic d’influences. Il y a plein d’autres petites choses dans ce Final Fantasy qui, mises bout à bout, en font un titre à part dans la série. Les emprunts aux anciens épisodes ne s’arrêtent pas au monde ouvert puisque l’on trouve un système de magie à mi-chemin entre les consommables de FFVIII et le crafting de Crisis Core, une demi-douzaine d’arbustes de compétence (FF IX et X), des contrats de chasse dans le monde ouvert (FF XII) et j’en oublie comme la présence d’armures Magitech (FF VI) ou la possibilité d’acheter les bandes-son de tous les anciens épisodes pour les écouter en voiture avec ses camarades. On croise également un peu de Divinity par ici (un sort de feu brûlera le sol et pourra infliger des dégâts à vos alliés) ou même, plus rigolo, un soupçon de clin d’œil à Dark Souls par là puisque l’expérience engrangée par l’équipe ne pourra être « validée » qu’après un bon repas et un gros dodo, souvent à côté d’un feu de camp. Autre gros changement, Final Fantasy XV est le tout premier épisode de la série intégralement doublé en français et, de ce qu’on a pu entendre, le casting se montre tout à fait convaincant – à l’exception de la voix de Noctis (le héros), un peu trop vieille pour un jeune prince fringant.
Le Au-delà de ses velléités d’ouverture et d’action, plus loin que ses combats confus et son doublage intégral, la véritable force de Final Fantasy XV réside dans son ambiance. On a déjà cité Xenoblade et Dark Souls pour rigoler mais il est temps de lâcher le vrai nom qui va énerver les puristes : Persona. Oui, il y a du Persona dans ce Final Fantasy, et pas seulement parce que les héros s’invectivent en plein combat ou prennent des selfies ensemble. On suit une bande de potes embrigadés dans une affaire qui les dépasse, mais cela ne les empêche pas une seule seconde de continuer à… ben à être des potes en fait. Ça semble idiot dit comme ça mais les entendre échanger des banalités, commenter leur repas de la veille ou se balancer des vannes apporte énormément à l’ambiance du titre. À l’instar des petites conversations du dernier Uncharted, les personnages ne s’arrêtent jamais de commenter ce qui leur arrive et offrent à FFXV une réelle dynamique forte entre les quatre personnages principaux. Grâce à cette super clique de héros complémentaires (et malgré l’absence de personnage féminin dans le groupe), ce FF pourrait bien être l’un des épisodes les plus « humains » de la série. Ne vous méprenez pas, j’ai fait beaucoup d’autres choses en quatre heures comme pêcher un gros poisson, nourrir un chat ou sauver un explorateur coincé par de vilains bestiaux mais les meilleurs souvenirs que je garde de ma session sont sûrement ces moments où, hypnotisé par le bitume pendant un long trajet en caisse, je me laissais agréablement bercer par les platitudes reposantes qu’échangeaient deux passagers.
Final Fantassin. Attention adorables lecteurs, n’allez pas tout de suite poster vos chèques en blanc à la direction de SquareEnix (envoyez-les plutôt chez nous, on saura quoi en faire, mon jacuzzi n’est pas terminé). Final Fantasy XV est excitant, c’est un fait. Mais pour tous ces moments de grâce, toutes ces quêtes rigolotes, tous ces dialogues séduisants, il y a quand même des combats encore trop nébuleux et handicapés par une caméra bourrée, sans oublier les graphismes qui picotent sévèrement les yeux. Pas que la beauté d’un jeu soit essentielle pour en apprécier les qualités, mais entre ses textures floues, son frame rate un peu fatigué et ses vilains bugs visuels ici et là, c’est pas vraiment la fête. J’ai même préféré demander s’il s’agissait d’une vieille version du titre mais les attachés de presse m’ont assuré qu’elle n’avait que quelques semaines. C’est con, après dix années de développement, on lui offrirait bien quelques mois de plus pour corriger ce souci. Notez que tout ceci disparaît parfois quand, au détour d’un joli décor, accompagné par la bonne musique, on oublie notre cataracte naissante pour profiter de l’ambiance incroyable qu’est capable de poser le jeu.