Du pixel-art crado, un vaisseau spatial vu du dessus avec des petits bonshommes qui s'agitent dans tous les sens, des systèmes au doux nom de « cuisine prototypique » ou « console de communication » qui prennent feu : Destination Ares excite sans doute autant qu'il effraie les habitués de la gestion de situation de crise. Surtout que les marges de manœuvre du joueur y sont limitées : dans le rôle de l'IA du vaisseau, il ne peut que déclencher des alarmes, gérer l'état des systèmes et répondre aux événements aléatoires (à la FTL, mais avec des mini-jeux répétitifs) qui rythment le voyage spatial vers la planète Ares. Inutile de vous dire que j'avais mis mon protège-dents avant de lancer ma première partie, et qu'après avoir éructé un courageux « ackboo, Macron, faites place, ténors de la gestion : j'arrive ! » je me suis lancé dans une aventure aussi périlleuse qu'exténuante. Enfin je romance, là, parce qu'en vrai c'était surtout facile et monotone.
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Destination Ares
L'odyssée du lisse
À la rédaction de Canard PC, il y a deux types de journalistes : ceux à qui l'on attribue des jeux de gestion tout mignons qui donnent la pêche – je ne vise personne, encore moins l'heureux Guy Moquette qui affiche un sourire insolent depuis qu'il joue à Planet Coaster – et puis les rédacteurs-martyrs, qu'on enferme dans des pièces mal éclairées pour jouer à des jeux ceinture noire de tabassage. Afin de ménager le suspense, je ne vous dirai pas à quelle catégorie j'appartiens, mais j'ai dégoté cette semaine au fin fond d'une cave un simulateur d'équipage de vaisseau spatial aussi aimable qu'une fosse à pics. Pas de montagnes russes et de foules qui gazouillent de joie, non, plutôt l'apparence d'un FTL austère et la profondeur d'un Rimworld ukrainien.
Ares-moi si tu peux. « À ma première partie, j'ai laissé la touche d'avance rapide enfoncée et j'ai réussi à faire 80% du voyage comme ça, avant de mourir à cause d'une étourderie (je ne savais pas qu'il fallait rallumer le recycleur d'excréments à la main). C'est voulu ? » Mon mail au développeur était un peu perplexe : ils ne sont pas légion, les jeux de gestion où l'on gagne en appuyant sur une touche en continu pendant que l'équipage se gère de manière parfaitement autonome. « Oui, c'est voulu que vous puissiez laisser le jeu faire tout lui-même ou bien au contraire gérer les moindres détails », m'a répondu (en l'occurrence) l'unique développeur, en précisant qu'on pouvait vraiment optimiser le voyage si l'on prenait la peine de se pencher sur tout ou de construire un vaisseau soi-même (j'ai essayé, c'est très chouette). Ma réponse fut donc quelque chose comme « OK mais alors c'est un jeu pour les amoureux de Microsoft Excel ou pour les grosses larves qui veulent gagner sans rien faire ? ». Je reçus alors cette clarification nébuleuse : « Les deux, je suppose. Il y a beaucoup à apprendre dans Destination Ares, et si beaucoup de choses se font automatiquement, elles sont loin d'être optimales. » Le vétéran pourra donc se pencher sur le recyclage des ressources, le moral de l'équipage, le dosage de poussée des réacteurs par rapport à la masse du vaisseau… pendant que le débutant gagne sans s'y impliquer vraiment. Pour le moment, avouons-le, aucun des deux types de joueurs ne peut vraiment trouver la victoire gratifiante. Mais après quelques passes d'équilibrage et l'ajout de quelques actions en plus pour le joueur, qui a des moyens parfois trop limités, Destination Ares pourrait peut-être bien séduire à la fois les experts et les profanes.