Plaider l'innocence serait logique, mais peu honorable : en appâtant mes candides collègues avec « un jeu multi local à tester pour le prochain numéro », je savais parfaitement dans quoi je les embarquais, parce que je m'étais déjà farci les treize didacticiels de Sumer et trois parties avec des IA. Bon, je trouvais – et je trouve encore – que Sumer avait quelque chose de spécial : dans ce jeu de plateau où les tours se déroulent en simultané, le but est de déposer le plus d'offrandes possible aux pieds d'une déesse manifestement assez paresseuse. Le côté rigolo, c'est que vous allez devoir confectionner vos offrandes vous-même, en posant des bâtiments dans la pyramide qui sert de plateau de jeu vertical, puis en ordonnant à vos esclaves d'aller faucher du blé ou cuire du pain dans la case adéquate. Les places sont limitées, alors il faut se grouiller d'atteindre les salles qui correspondent à la stratégie qu'on veut suivre : est-ce qu'il vaut mieux aller déposer des fardeaux de blé sur l'autel ou se prendre la tête à brasser les épis et fabriquer de la poterie pour créer de la bière, qui plaira beaucoup plus à la déesse ? Oui, sur le papier, Sumer a tout : de la tension, des choix difficiles, de la compétition. Sur le papier. Sur l'écran, c'est une autre histoire.
Transformé en archive gratuite
- Cet article, initialement réservé aux abonnés, est devenu gratuit avec le temps.
Sumer
Ziggurat des champs
Parmi les jeux en multi local, la concurrence est féroce : s'imposer face à Towerfall, Nidhogg et Mount Your Friends demande un peu plus que de bonnes intentions et une bouche en cœur. Oui, j'ai l'air d'avoir un avis hyper tranché sur la question, mais en fait ça vient de me traverser l'esprit parce que j'ai croisé les yeux vides et hagards de Kahn Lusth, Maria Kalash et Monsieur Chat après notre partie de Sumer.
Panier Persée. Il n'aurait pas fallu grand-chose pour rendre Sumer agréable : quelques variantes, de quoi pimenter un peu la session de jeu, et surtout des mécaniques qui reposent moins sur le fait de toujours accomplir la même action en boucle sans se soucier des autres. J'ai beau apprécier le concept du jeu et ses quelques trouvailles, reste qu'en l'état, les parties sont monotones et laborieuses – parce qu'il faut attendre que tout le monde aille se coucher pour finir chaque tour. Le pire, et c'est là la vraie tare du jeu, c'est qu'il n'a prévu aucune interaction entre les joueurs, qui ont tout intérêt à s'ignorer jusqu'au tableau des scores finaux. Alors oui, quand Sumer aura corrigé ces défauts et qu'il proposera du multijoueur en ligne (en 2018, d'après les développeurs), il sera sans doute beaucoup plus intéressant. En attendant, vous avez le droit de conspuer un ami qui vous accueillerait chez lui avec un jovial « on se fait un petit Sumer ? » alors que Helldivers, Crawl, Sportsfriends et consorts sont disponibles.