Savez-vous pourquoi le premier Star Wars Battlefront n'avait pas de campagne solo ? Eh bien, je vais vous le dire, parce que je n'ai pas peur d'attaquer les puissants telle une Élise Lucet du pixel : pour de basses raisons marketing. Citons Patrick Sunderland, le patron des studios Electronic Arts, quelques mois après la sortie du jeu : « Éliminer la campagne solo fut une décision que nous avons dû prendre en toute conscience, afin de pouvoir lancer Star Wars Battlefront en même temps que le film Le Réveil de la Force. » Oui, c'est triste. Le pire, c'est que des millions de gogos n'ont pas hésité à cracher 60 euros, et Star Wars Battlefront a été le quatrième jeu le plus vendu de 2015, toutes plateformes confondues.
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Star Wars Battlefront 2
L'Empire contre-contre-attaque
Mon cœur saigne encore de la cruelle déception que fut Star Wars Battlefront. Toutes les conditions étaient réunies pour nous faire enfin un grand jeu Guerre des Étoiles. Et Dice s'est planté, sortant un shoot multi banal, aussi pauvre en contenu que le budget écologie et développement durable du gouvernement Palpatine. Avec Battlefront 2, le studio suédois semble quand même vouloir corriger le tir.
Les stormtroopers d'élite comme Iden Versio ne se baladent pas en armure blanche de normie. Ils sont tout de noir vêtus, car c'est plus classe et moins salissant.
Les stormtroopers d'élite comme Iden Versio ne se baladent pas en armure blanche de normie. Ils sont tout de noir vêtus, car c'est plus classe et moins salissant.
Dice étant très avare en photos d'écran, la majorité de celles de ce test sont issues de mes pérégrinations sur la bêta multijoueur du jeu. Mais bon, le moteur graphique est identique.
Dice étant très avare en photos d'écran, la majorité de celles de ce test sont issues de mes pérégrinations sur la bêta multijoueur du jeu. Mais bon, le moteur graphique est identique.
Les stormtroopers aussi sont des êtres humains. Ils ont des sentiments. Une famille. Des amis. Des rêves. Des espérances.
Location de studio. Laissons cette navrante affaire derrière nous et regardons vers l'avenir. Les Suédois de Dice ont bien compris que les fans étaient grognons et ne leur pardonneraient pas la même erreur sur Battlefront 2. Pour l'occasion, ils ont donc carrément fait appel à un autre studio. Dice fournit le moteur de jeu et toute la partie multijoueur (dont nous vous avons déjà parlé dans ces pages), tandis que Motive s'est entièrement consacré à la production d'une véritable campagne solo avec scénario, cinématiques, et tout le bazar. Le nom de cette échoppe canadienne ne vous dit peut-être rien, mais vous connaissez sûrement déjà sa patronne : il s'agit de Jade Raymond, une vétérane du milieu, ancienne de chez Sony et Ubisoft, productrice sur Assassin's Creed II (à mon humble avis le meilleur épisode de la série) et Watch Dogs (là c'est moins glorieux, mais bon). La dame connaît donc très bien son affaire.
Les doigts dans le nez Dire que je n'ai pas de grandes affinités avec le concept de shoot 3D à la manette serait un euphémisme. Et pourtant, après avoir joué au jeu sur Playstation 4, je n'ai pas trop ronchonné. Certes, les développeurs ont rajouté un soupçon de visée automatique pour simplifier la manœuvre, mais ça passe plutôt bien. En mode de difficulté normal (de mémoire, il s'appelle soldier), le jeu est tout de même relativement facile. L'héroïne peut être adaptée à ses préférences personnelles avec un système de cartes optionnelles remplaçant les trois pouvoirs spéciaux de base. En trouvant une bonne combinaison (bouclier énergétique, grenades et fusil à pompe surpuissant), j'ai pu filer à travers les trois missions sans mourir une seule fois. Les tirs ont une dispersion plus faible que dans le premier Star Wars Battlefront, les headshots sont donc assez faciles à réaliser, même à longue distance. En prime, les grouillots de la rébellion visent aussi mal qu'un stormtrooper de base. Tout cela pour vous dire que sur PC, avec un clavier et une souris, il faudra probablement jouer dans le mode de difficulté le plus élevé pour que le challenge soit intéressant.
Versio 1.0. En parlant de dame, laissez-moi vous introduire celle qui va désormais être un nouveau personnage de poids dans le folklore officiel Star Wars : Iden Versio. Iden est une grande brune athlétique, soldate des forces spéciales de l'Empire et commandante de l'escouade Inferno. Elle sera l'héroïne de la campagne solo de Battlefront 2. « Quoi !? On va jouer une raclure impériale ! Mais c'est nul, moi je voulais être du côté des gentils rebelles ! » Ha ha, arrêtez avec vos niaiseries, tout le monde sait que dans l'univers Star Wars, l'Empire est vachement plus cool que la rébellion. Ils ont les vaisseaux les plus sexy, les armures les plus propres, les cérémonies militaires les mieux organisées et les droïdes de torture les plus conviviaux. Et puis flûte, il faut le dire : les stormtroopers aussi sont des êtres humains. Ils ont des sentiments. Une famille. Des amis. Des rêves. Des espérances. Vous êtes-vous déjà demandé ce qu'un soldat de l'Empire a pu ressentir en voyant l'Étoile Noire exploser dans le ciel à la fin de l'épisode IV ? Certains spécialistes de l'histoire Star Wars n'hésitent pas à parler de génocide à ce sujet. Par sa funeste torpille à proton, Luke aurait tué environ un million de personnes. Pour moi, Skywalker est le Staline de Star Wars. Le Pol Pot galactique. Un boucher sanguinaire en X-wing.
Voyons voir, ils ont déjà les modèles 3D des vaisseaux, les environnements spatiaux, les sons, les cockpits et des centaines de programmeurs... Ça leur prendrait quoi, de nous faire un X-Wing Alliance 2 ? Six mois ? Un an ?
Voyons voir, ils ont déjà les modèles 3D des vaisseaux, les environnements spatiaux, les sons, les cockpits et des centaines de programmeurs... Ça leur prendrait quoi, de nous faire un X-Wing Alliance 2 ? Six mois ? Un an ?
Pour moi, Skywalker est le Staline de Star Wars. Le Pol Pot galactique. Un boucher sanguinaire en X-wing.
Un peu d'infiltration, car pourquoi pas. C'est durant une autre grande bataille meurtrière, celle d'Endor (donc la fin du Retour du Jedi), que débute la campagne solo de Battlefront 2. Nous avons pu jouer aux trois premières missions. Baptisée « The Cleaner », la phase d'introduction se déroule à bord d'un croiseur rebelle dans lequel Versio est retenue prisonnière. Je m'attendais à quelque chose de très basique, un shoot 3D console standard, un boum-boum pan-pan Star Wars sans saveur, mais j'ai été surpris dès les premières minutes. Versio, coincée dans sa cellule, réussit à rentrer en contact avec son mini-droïde de combat IC-10, entreposé par les rebelles dans un local technique. Démarre alors une phase d'infiltration où il faut diriger le robot à travers les conduits d'aération du vaisseau insurgé jusqu'à la cellule de sa proprio. Une fois libérée, Iden Versio se faufile dans les couloirs sur la pointe des pieds et neutralise furtivement ses geôliers, tel l'agent 47 de Hitman. Alors attention, je ne dis pas que Battlefront 2 sera un jeu d'infiltration... On s'en rend compte un peu plus tard, quand notre tueuse d'élite met finalement la main sur un fusil laser et se met à dézinguer du séditieux pendant quinze minutes. Apprécions quand même l'effort des développeurs pour, dès le début de l'aventure, offrir un peu de variété dans les styles de jeu.
Endor, c'est plus beau que Monaco. Cette première mission est sympa, mais tout se déroule dans les couloirs étroits d'un vaisseau spatial aseptisé. C'est durant le deuxième chapitre, « La Bataille d'Endor », que Battlefront 2 commence à montrer ses muscles. Progressant dans les paysages verdoyants de la lune forestière, Iden Versio et ses copains soldats de choc doivent rejoindre une plateforme où sont garés des chasseurs TIE. En chemin, ils croisent des patrouilles rebelles qu'ils prennent en embuscade, aidant même parfois quelques escouades de stormtroopers. Grands absents de cette mission : les Ewoks. Les développeurs ont peut-être jugé qu'il valait mieux, pour conserver les bonnes grâces de Disney, s'abstenir de montrer les sympathiques nounours décapités au lance-roquettes par des Rambos impériaux... Quoi qu'il en soit, l'action est impeccablement menée. C'est de la bonne grosse superproduction vidéoludique dans du décor à grand spectacle. Les coéquipiers IA accompagnent le joueur de manière cohérente et attendent ses ordres avant de tirer sur les patrouilles rebelles pour que l'effet de l'embuscade soit optimal. Les fusillades sont nerveuses, avec des soldats rebelles qui déboulent de partout en hurlant des ordres. Il y a même un petit AT-walker qui fait son apparition, histoire de faire plaisir aux fans. Certes, c'est un peu bourrin. L'héroïne encaisse sans problème cinq ou six lasers en pleine poire sans crever, se réfugie derrière un tronc d'arbre quelques secondes pour que sa barre de vie se remplisse à nouveau, puis repart à l'assaut en balançant des grenades.
Je vendrais mon corps et ma dignité pour un X-Wing Alliance 2 avec ce moteur graphique.
Un moteur 3D impérial. Bien sûr, on ne va pas demander à un Battlefront d'être un Arma 3 ou un STALKER. Là n'est pas l'intérêt de ce genre de jeu. Ce qu'on veut, c'est du shoot Star Wars dans des environnements Star Wars, avec l'ambiance Star Wars. Et de ce côté-là, Dice et Motive ont réalisé un boulot remarquable. Je ne surprendrai personne en disant que le moteur Frostbite affiche les sous-bois d'Endor comme jamais aucun titre Star Wars ne l'a fait avant lui. Sur Playstation 4, le jeu est aussi beau que fluide. Pas un seul ralentissement, une distance de vue très honorable, des arbres par centaines, des textures nettes... Et toujours cette patte Dice dans la gestion de la lumière et des couleurs qui donne un rendu photoréaliste assez bluffant. Les artistes ont utilisé le même procédé que sur le premier Star Wars Battlefront, la photogrammétrie. Je vous conseille d'ailleurs de visionner leur passionnante présentation à la Game Developers Conference de 2016 si vous vous intéressez aux coulisses techniques du jeu vidéo. Tout ça pour dire que le titre est splendide, et que je suis bien humide à l'idée de ce que cela va donner sur PC avec une Geforce 1080 et toutes les options graphiques réglées au maximum. Il faut aussi noter que les niveaux, de bonne taille, ne souffrent pas du moindre écran de chargement qui viendrait interrompre le rythme des fusillades.
Tir aux pigeons à grand spectacle. En plein rando-carnage dans la forêt, les soldats de l'escouade Inferno assistent impuissants à l'explosion de la seconde Étoile Noire au-dessus de leur tête. Et je vous promets qu'à ce moment, on ressent bien le blues du stormtrooper que j'évoquais plus haut. Tout énervés, Iden et ses camarades décident de s'envoler pour rejoindre leur star destroyer de commandement. Et là, bim bam boum, séquence de pilotage spatial. Que dire... Le fan de vieux jeux de combats spatiaux Lucasarts des années 1990 en aura les larmes aux yeux. Les pioupious des lasers, le reflet de la lumière sur le métal des vaisseaux, les torpilles à proton qui filent vers les y-wings... Je vendrais mon corps et ma dignité pour un X-Wing Alliance 2 avec ce moteur graphique. Quelques minutes plus tard, dans la troisième mission nommée « Dauntless » (intrépide), il y a du survol de croiseur interstellaire gigantesque et des attaques sur des corvettes corelliennes. Magnifique. Émouvant. Bien sûr, le pilotage est très arcade et se fait à la troisième personne (avec une option pour passer en vue cockpit, moins pratique). Vous n'avez pas de gestion fine de l'énergie et des boucliers comme dans un X-Wing, ni bien sûr la même profondeur tactique. C'est du tir aux pigeons. Mais encore une fois, parce qu'il y a cette ambiance Star Wars épique, cette bande-son magistrale, ces communications radio frénétiques sur fond de hurlement de réacteurs, ça passe comme du petit lait.
Star Wars Battlefront 2 devrait faire exactement ce qu'on lui demande : exploiter jusqu'au trognon, avec un budget écœurant, une licence bien grasse.
À l'est d'Iden. En préambule de leur présentation, les gens de Dice nous racontaient que cette campagne solo avait pour but d'assouvir trois fantasmes de fans : incarner un trooper Star Wars, un pilote Star Wars et un héros Star Wars. Après avoir passé deux heures dans la peau d'Iden Versio, je suis plutôt optimiste sur leurs chances de réussite. Certes, Star Wars Battlefront 2 ne s'imposera pas comme un jeu d'action incroyablement innovant. Il sera grand public à mort. Mais il devrait faire exactement ce qu'on lui demande : exploiter jusqu'au trognon, avec un budget écœurant, une licence bien grasse. Et le fait de jouer une tueuse impériale, de se retrouver du côté des méchants semble fonctionner à merveille. Cela permet de voir cet univers bien connu sous un angle différent. Avec sa vraie campagne solo – si elle dépasse les trois ou quatre heures de jeu bien sûr... – et une partie multijoueur qui semble plus travaillée et exigeante que dans l'épisode précédent, Star Wars Battlefront 2 pourrait donc être, enfin, le grand jeu Star Wars que l'on attend depuis des années. Notez bien que je dis grand jeu Star Wars, et pas grand jeu tout court.
