Après le scandale provoqué par l'exclusion de Blitzchung des Hearthstone Grandmasters, après le fiasco de la Blizzcon 2018 qui avait laissé les joueurs sur leur faim avec l'annonce du moulin à thunes chinois Diablo Immortal, Blizzard avait trop à se faire pardonner : l'annonce de Diablo 4 n'était pas une hypothèse, c'était une certitude. Les développeurs avaient beau reconnaître eux-mêmes que « Diablo 4 n'est pas pour bientôt, même au sens que Blizzard donne au mot "bientôt" », ils devaient le montrer, quitte à l'inventer. Bon, « inventer » est peut-être un grand mot, puisque tout le monde se doutait depuis longtemps que le jeu était en développement. Mais on sait Blizzard frileux à parler de projets non terminés depuis la fin tragique du projet Titan. Et cette annonce de Diablo 4, sans l'ébauche d'une date de sortie, ressemble quand même à une grosse escalope jetée dans la fosse aux lions pour calmer la colère des fans. Une escalope qui, cela dit, se révèle quand même assez goûtue, puisque même Izual, l'homme le plus blasé de la Terre, pour qui l'histoire du hack'n'slash s'est arrêtée à Diablo 2, m'a confié d'un air entendu être, je cite, « mini-hypé ».
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Diablo 4
Méphisto fêlé
Comme a coutume de dire Batman après avoir tabassé un miséreux sans s'encombrer d'un détour par le palais de justice, « il ne faut pas accuser sans preuve ». Loin de moi l'idée de contredire monsieur Wayne – il ne faut jamais se mettre à dos un milliardaire, ce serait dommage de se priver d'une bonne surprise au moment de la lecture du testament – mais j'ai quand même du mal à imaginer que l'équipe de Diablo 4 n'ait pas crunché à mort, dans la sueur et le sang, pour produire une vertical sliceNote : 1 à temps pour la Blizzcon. Seulement voilà, les pauvres n'avaient pas le choix.
Note 1 : Court échantillon d'un jeu bricolé pour donner un aperçu de son gameplay.
Démon jouable. Impossible il faut dire de regarder une seconde de Diablo 4 sans penser immédiatement à Diablo 2 ou Path of Exile. La direction artistique est beaucoup plus sombre et réaliste, à mille lieues du look cartoon et coloré qui avait failli déclencher une émeute lors de l'annonce de l'épisode précédent en 2008. Certains y voient une main tendue aux fans historiques de la licence mais, plus prosaïquement, on peut supposer que Blizzard a enfin compris qu'il n'est pas impératif, ou même souhaitable, d'avoir un catalogue entier de titres qui ressemblent à World of Warcraft. En ce qui concerne le gameplay, ce qui a été annoncé serait plutôt réjouissant si l'expérience ne nous avait pas appris que tout changera sans doute trois fois d'ici à la sortie. Notons tout de même que, comme son prédécesseur, Diablo 4 sera jouable uniquement en ligne. Le monde, divisé en cinq régions, sera ouvert, vaste (des montures aideront à traverser de grandes distances), pourvu d'une météo dynamique et d'un cycle jour-nuit, et il sera possible d'y croiser les autres joueurs comme dans un MMO. Les donjons seront quant à eux instanciés, ce qui donnera non seulement l'occasion de jouer tout seul si on veut avoir la paix, mais aussi de choisir « avec une grande précision » la difficulté des combats – grâce, on l'imagine, à un système semblable à celui de Diablo 3. Certains boss et événements nécessiteront toutefois de collaborer avec d'autres joueurs pour espérer l'emporter. Le endgame proposera une « grande variété d'activités », dont on ignore tout à l'exception des « key dungeons » : des clés, qu'on récupérera au gré des combats, donneront la possibilité de transformer n'importe quel donjon en une version plus difficile et mieux fournie en loot. Chaque clé aura des propriétés uniques (par exemple faire apparaître dans le donjon un gros rocher qui endommage le joueur en permanence) et celles qui n'intéressent pas le joueur pourront être détruites pour obtenir des matériaux de crafting.
Lolquatre. Tiens d'ailleurs, parlons du loot. On trouvera bien sûr des objets légendaires et des « sets » même si, contrairement à Diablo 3, ces derniers ne devraient plus truster le haut du tableau des stats, afin d'éviter que les seuls builds valables à haut niveau soient bâtis autour d'un set. Autre excellente idée, le retour des runes – de vraies runes qu'on ramasse, pas des icônes bidon pour les modificateurs de skills – et des mots runiques, avec un semblant de grammaire : il sera possible de lier une rune « condition » (« lorsque le joueur boit une potion... », « lorsqu'un ennemi est assommé... ») à une rune « effet » (« ... réduire le cooldown d'une compétence de 15 % », « ... récupérer des points de vie »), et les pierres qu'on a enchâssées dans son équipement progresseront au fil du temps. Sur ce point aussi, l'influence de Path of Exile se fait sentir – à ce sujet, notez que Blizzard n'exclut pas d'inclure des microtransactions dans le jeu même si, promis-juré, les upgrades seront uniquement cosmétiques. Pour le reste, on sait que cinq classes seront disponibles au lancement du jeu, auxquelles d'autres viendront s'ajouter plus tard sous forme d'add-on payants. Les trois qu'on a pu voir, barbare, sorcière et druide, ressemblant furieusement à leurs modèles de Diablo 2. C'est sans doute le seul point noir de cette annonce si longtemps attendue : même si la recette choisie par Blizzard, mélange de la noirceur de Diablo 1, de l'univers de Diablo 2 et de l'efficacité de Diablo 3, est alléchante, rien, dans tout ce qui a été montré, n'était inédit. De la part d'une licence qui, pour le meilleur et pour le pire, a su avec chaque épisode réinventer le hack'n'slash, c'est tout de même le signe d'un sérieux manque d'ambition.