Dans Hob, vous incarnez un petit être en robe. De lui, vous ne saurez pas grand-chose de plus. Robot ou humain, minéral ou organique, rien de sa condition ne nous est explicitement exposé. Seulement, si vous prenez le temps de l’observer, vous remarquerez des détails troublants : ce lourd gantelet de fer qui chausse tout son bras gauche disproportionné, est-ce une prothèse métallique pour créature biologique ou juste une pièce de rechange pour androïde solitaire ? Cette lueur d’un bleu tout sauf naturel qui lui sert de regard, trahit-elle une diode ou de la magie ? C’est, selon ses développeurs, une partie de l’objectif de Hob : laisser les joueurs explorer, observer, reconstruire par eux-mêmes la biographie de ce personnage, l’histoire de ce monde en lambeaux, grâce aux indices épars qu’ils leur ont laissés.
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Hob
La mécanique des druides
On vous a dit qu’on avait déménagé ? Je ne crois pas. Eh bien voilà, on a déménagé. Nos nouveaux bureaux se trouvent dans un bâtiment immense et ultra-moderne, voyez-vous. Le genre en verre et matériaux composites, avec des mécanismes planqués et astucieux, et des plantes qui tombent élégamment pour donner au travailleur le sentiment qu’il reste connecté à la nature. Je pense que dans 12 000 générations, ce bâtiment ressemblera exactement à ce que l’on voit dans Hob.
What is Hob ? Nous avions vu Hob pour la première fois à la Gamescom, l’année dernière. Nous avions alors visité d’obscurs donjons électrifiés et surmonté de nombreux obstacles dans une nature verdoyante. Il y a quelques semaines, Runic Games, ses développeurs, oui, oui, les mêmes qui sont responsables des deux Torchlight, nous ont proposé de venir nous montrer ce que devenait Hob. Nous avons visité à nouveau un donjon électrifié et une nature verdoyante. Et comme la première fois, nous avons goûté ces paysages apaisants, ces biomes soignés où s’égaillent des mobs aux airs de gros microbes, où de gros cabots cherchent à vous croquer le lobe de l’oreille, où, derrière chaque merveille botanique ou mécanique se cache un nouveau danger mortel aux couleurs passées. Car dans Hob, vous passez votre temps à organiser et à réorganiser le monde. Constitué de gigantesques strates mécaniques, d’immenses blocs, de globes colossaux, vous devrez d’abord explorer, observer et trouver les mécanismes à activer, réveiller les circuits électriques d’un monde longtemps endormi. Les rouages se mettront en branle et vous accéderez ainsi à de nouvelles zones, ou à des zones que vous connaissiez déjà mais dont la configuration aura changé, dont l’agencement nouveau offrira des possibilités nouvelles. Vous progresserez ainsi, en débloquant des passages, en faisant choir des blocs qui feront ensuite office d’escabeaux, en rembobinant d’énormes ressorts. Quand tout un pan du paysage apparaît, glisse, et vient s’offrir à vous, l’ébaudissement prend des proportions mystiques.
Hobby don’t hurt me. Nouveau Robinson découvrant les reliques d’un monde obsolète, vous devrez aussi vous intéresser à la faune locale, celle qui vit bel et bien et celle que votre présence réactive. Runic n’a pas ménagé ses efforts pour que le monde paraisse vivant, réagisse à vous. Certaines créatures pacifiques ne vous attaquent pas, se contentent de mener une vie paisible. Tuez-les, elles finiront par vous fuir. Préservez-les, caressez-les (à vous de trouver comment) et vous parviendrez à vous en faire des amis. D’autres espèces, animales, végétales ou robotiques, ne verront pas votre intrusion d’un très bon œil. Outre l’orientation et la compréhension de ces structures protéennes, vous devrez aussi bolosser des cabots obèses et oblitérer des robots obtus. Pour vous aider dans cette tâche, vous aurez quelques outils à votre disposition. Une épée, un bouclier, la possibilité de courir et de charger votre poing mécanique pour donner de très puissants coups. À mesure de votre progression, vous trouverez bien sûr de quoi soigner vos bobos, mais aussi diverses améliorations : élongation de vos barres de vie et d’énergie, alourdissement de vos coups de poing, adjonction de grappins, découverte de la téléportation. Nonobstant, les développeurs nous l’assurent, rien de tout ceci n’est obligatoire, vous pouvez, si vous trouvez le jeu trop facile, vous en passer et avancer à poil.
Hobladi, hoblada. De fait, ce qui nous a été donné de tâter de Hob ne laissait pas entrevoir une difficulté démentielle. Certes, on meurt souvent, que ce soit par la faute d’un obus lancé par une aubépine, parce qu’on a surestimé les capacités acrobatiques de son personnage, ou parce qu’un mécanisme s’est refermé sur le petit bonhomme en cape. Mais le point de sauvegarde n’est jamais trop loin de l’action, les temps de chargement à peu près insensibles ne laissent pas le temps de s’énerver, et l’on progresse ainsi, bon an mal an, profitant de la beauté du paysage, de l’ambiance posée par le vent dans les arbres, les grincements sinistres des rouages formidables ou les borborygmes des bestioles benoîtes.
Hob l’éponge. Pour qui manie la manette depuis l’aube de ses jours (le clavier-souris est prévu mais pas recommandé), les influences embaument le bon goût. Le mélange entre combats et puzzles monumentaux rappelle évidemment Zelda : Breath of the Wild, et ceux d’avant aussi. L’action-aventure dénuée d’objets à collecter, de villages à explorer, de personnages à qui parler, cela fait aussi penser à Shadow of the Colossus. La progression muette de ce héros bondissant, tient également de l’hommage à Journey. Mais là où l’on peut s’extasier sur la bonne tenue des références des développeurs, louer leur capacité à sortir une aventure qui semble partie pour offrir plusieurs degrés de lecture et une assez grande liberté de mouvement au joueur, je m’inquiète. Ma plus grande crainte serait que Runic ne nous livre un jeu générique. Un titre si beau et si lisse qu’il glisserait sur nous comme l’eau sur les plumes du Canard ? Ce ne serait pas un Hob, mais un hic.