Izual
le 19 décembre 2024
Je pensais partir serein, un sourire aux lèvres, sur un cheval qui trotte vers le soleil couchant. Mais là, devant une page blanche où j’ai juste écrit « Au revoir Canard PC », au moment d’écrire ce qu’ont signifié ces dix ans pour moi, je fais beaucoup moins le malin.
Après dix ans, j’ai encore du mal à réaliser la chance que j’ai eue de bosser ici, dans un média où l’on choisit nos sujets d’articles, où l’on décide parfois d’ignorer avec superbe des gros jeux qui font l’actu, où l’on est encouragés à écrire des trucs zinzins. Ce n’est pas facile, de mettre tout ça derrière soi, mais à l’aube de ma trentaine je me rends compte que j’ai soif d’autre chose. Alors voilà, je pars à l’aventure (je pars au chômage).
Outre un message d’insultes écrit de la main d’ackboo – l’un de mes trésors –, il me restera des souvenirs plein le ciboulot : quand on a frôlé la mort entassés dans un taxi fou de la Gamescom, quand on prenait l’apéro sur le bitume du parking de la rédac’ à Malakoff, quand on s’est lancés sur Twitch et qu’on était tous livides, quand Casque faisait vrombir son drone-de-la-terreur à Soleillet.
Et puis à titre perso, je suis content de quelques petits trucs aussi (c’est un peu égoïste mais bon, vous n’aviez qu’à écrire votre propre lettre d’adieu). Afficher une capture d’écran d’un jeu ASCII sur une page entière, m’essayer aux scénarios de BD pour Couly (« la poudre à jeux de mots » restera l’une de mes plus grandes fiertés), publier un livre sur Fallout, écrire un archéo-test pour le remake de The Last of Us, prendre plus de six pages pour refaire toute l’histoire du jeu Flash, et puis dire à Ivan « j’ai dégoté un jeu de rôle qui a l’air fou, fait par d’ex-squatteurs estoniens à Brighton, mais il n’existe peut-être même pas » pour qu’il me réponde aussitôt « il faut y aller ! », revenir et faire sans hésiter la couverture du magazine avec Disco Elysium, le jeu de rôle qui allait tout changer.
Par peur d’en oublier, je ne me risquerai pas à lister les gens avec qui j’ai adoré travailler à Canard PC, mais impossible de ne pas remercier les deux rédac’ chefs dont j’ai été l’adjoint, Kahn Lusth et Ellen Replay, pros parmi les pros. Merci à Ivan et Jérôme, aussi, qui m’ont embauché et formé au temps jadis. Une pensée encore pour les équipes de modération que j’ai coordonnées pendant des années : ça a été un bonheur et un honneur d’être au contact de personnes aussi sympas, aussi rigoureuses et aussi contentes de donner de leur temps libre pour que notre communauté soit saine et accueillante. Notre communauté, nos lecteurs, nos lectrices, c’est ce qu’on a de plus précieux. Alors merci pour votre soutien toutes ces années ; j’espère que vous avez aimé me lire des fois. Même les Rouennais.