Raison et financement
Quand on pense jeu de rôle, que ce soit sur table ou sur écran, on imagine volontiers des dragons, des chevaliers et parfois un aventurier cyberpunk ou un lieutenant galactique. Il faut désormais compter avec la gentry britannique de la fin du XVIIIe siècle. Après Ever, Jane, MMORPG toujours en développement, le monde ludique assiste désormais à la naissance sur Kickstarter de Good Society, un jeu de rôle sur table situé dans l’univers de la romancière anglaise Jane Austen. Les Storybrewers, le duo d’Australiennes à l’origine du projet, avaient déjà financé de la même manière, et sorti, un jeu de rôle intitulé Alas for the Awful Sea, une histoire de marins anglais et de forces mystérieuses. Mine de rien, à trois semaines de la fin de la campagne, elles ont déjà pas loin de 50 000 euros. Cela mérite bien une petite révérence. M.K.
Les trois frères
C'est bientôt Noël, l'heure des contes et des belles histoires. Par exemple celle de Asad, Asif et Ash Habib, trois frères passionnés de jeu vidéo mais dénués de la moindre expérience en matière de développement, qui un beau matin se sont dit « tiens, si on faisait un jeu de boxe ? » À force de journées passées à apprendre la programmation et la modélisation 3D devant des tutos YouTube, ils ont fini par obtenir quelque chose de vaguement montrable. Ils ont alors quitté leur emploi, commencé à démarcher des fédérations de boxe pour obtenir le droit d'utiliser l'image de sportifs bien réels. Le résultat : Undisputed, qui a à lui seul remis le jeu de boxe à la mode et s'est écoulé à plus d'un millions de copies. Certes, le jeu s'est fait descendre par la critique et est jugé « plutôt négativement » sur Steam, mais c'est comme ça avec les contes de Noël, il faut s'intéresser à l'esprit, pas à la lettre. LFS.
Les tas de l'art
Si vous avez 16 000 balles de côté et l'envie pressante de vous faire humilier par ackboo lors du prochain tribunal des bureaux, vous voudrez sans doute acheter « Medusa », un PC disons, euh… différent créé par la marque singapourienne Aftershock. En plus de PC gaming ordinaires, Aftershock propose en effet une gamme de PC « d'art » qui, non contents d'offrir un hardware assez brutal (Ryzen 7 7800X3D et GeForce 4090), ont des formes qui seront du meilleur effet sur votre bureau, pour peu que vous ne fréquentiez que des gens dénués du moindre goût. Le « Medusa » ressemble à ce qui serait passé à la fin de La Mouche si Seth Brundle avait fusionné avec une statue de Cellini. Le « Alien » est inspiré du xénomorphe de Giger. Quant au « Infinity », on se demande s'il s'agit d'une machine de jeu ou d'un caisson de cryogénisation. C'est hideux, certes, mais n'oublions pas qu'on part de très bas et qu'il s'agit toujours d'une vaste amélioration par rapport aux boîtiers RGB 50 000 lumens et aux tapis de souris avec des nichons. LFS.
Comment tuer ce qui est déjà mort ?
« N'est pas mort ce qui à jamais dort », a coutume de dire mon chat. Les faits viennent une fois encore de lui donner raison puisque DayZ a battu son record de joueurs simultanés onze ans après sa sortie en early access, avec 78 000 petits galopins connectés au même moment. Un résultat qui a étonné le vaste couillon que je suis, jusqu'ici persuadé que DayZ, après avoir changé à jamais l'histoire du jeu vidéo en popularisant le battle royale et en permettant l'apparition de jeux comme PUBG ou Fortnite, était mort de vieillesse dans sa petite niche hardcore. Je n'étais pas seul à le penser, puisque la plupart des commentateurs mettaient en avant le succès du DLC « Frostline » récemment sorti, qui aurait provoqué ce pic de connexion. Eh bien figurez-vous que pas du tout : avant même la sortie du DLC, DayZ était sur une pente croissante depuis des années, les stats Steam sont formelles à ce sujet, je ne sais pas ce qu'il vous faut de plus. LFS.
La lubie d'Ubi
Rappelez-vous, c'était il y a trois ans. À l'époque, les venture capitalists cocaïnés brûlaient leur pognon dans des start-ups aux pitchs farcis de « blockchain » et de « web 3.0 » et Ubisoft, qui n'en rate jamais une, disait son intérêt pour les jeux à base de NFT. On pensait l'idée abandonnée (à la fois parce que la blockchain est passée de mode et que ça avait pas mal râlé en interne chez Ubi), il n'en était rien. Fin octobre est sorti Champions Tactics: Grimoria Chronicles, un free-to-play de combat tactique en tour par tour dans lequel les héros sont représentés par des figurines liées à des NFT, qui doivent être achetées avec de vrais brouzoufs ou des cryptomonnaies. Oui, c'est honteux, et Ubisoft est au courant : non seulement le jeu a été shadowdroppé mais rien dans le trailer n'indique qu'il s'agit un jeu web 3.0, il faut aller voir le site (ou lancer le jeu et découvrir que certains héros sont vendus 63 000 dollars) pour l'apprendre. LFS.
Les raisons du divorce
Raphael Colantonio, qui a été l'un des fondateurs d'Arkane en 1999 et y a créé un paquet de grands jeux (Arx Fatalix, Dark Messiah of Might Magic, Prey, les deux Dishonored) s'exprime enfin sur les raisons qu'ils l'ont poussé à quitter le studio il y a sept ans. « Tout ce que je peux vous dire, c'est que je suis parti car Bethesda [ndr : qui a racheté Arkane en 2010] ne voulait plus faire le genre de jeu que j'aimais », a-t-il déclaré à PC Gamer. Il souhaitait continuer à faire des immersive sims, en espérant que les ventes s'améliorent (car les jeux d'Arkane n'ont jamais été d'immenses succès commerciaux), tandis que Bethesda insistait pour faire du game as a service multijoueur. Cette stratégie a conduit à la sortie du calamiteux Redfall, et à la fermeture d'Arkane Austin début 2024. De son côté, Raphael Colantonio a fondé Wolfeye Studio et sorti Weird West en 2022. A.
Le rachat de l'apocalypse
Les rumeurs enflent suite aux déboires d'Intel, qui ne fait plus que sortir des CPU un peu nazes et licencie des employés à la chaine – la dernière charrette, en août, a mis 15 000 salariés sur le carreau. Trois mastodontes du secteur seraient en train de renifler le géant américain pour savoir s'il ne serait pas temps de le croquer. En septembre, le nom de Qualcomm (qui a commencé à fournir ses propres processeurs ARM pour Windows) a été évoqué. Puis le coréen Samsung s'est ajouté à la liste. Aujourd'hui, la chaine YouTube spécialisée Moore's Law is Dead rapporte que des discussions « sérieuses » auraient lieu entre Intel et Apple autour d'un rachat. Rumeur, petit grain de sel, grosses pincettes, tout ça, mais ce serait un séisme (et probablement une mauvaise nouvelle pour les consommateurs) si tout cela se concrétisait. A.
La deuxième mort de Concord
Voici ce qui est peut-être l'info la plus prévisible de l'année : Jason Schreier annonce sur Twitter que Sony ferme Firewalk Studios. Pour mémoire, cette équipe fondée à Seattle en 2018, avait été rachetée par l'éditeur japonais en 2023, alors qu'elle développait le shoot multijoueur Concord sur PC et PlayStation 5. Malgré son budget colossal – on parle de 400 millions de dollars –, le jeu s'est vendu à... 25 000 exemplaires, et la fréquentation des serveurs s'est rapidement effondrée. Il aurait rapporté un pauvre petit million de dollars, avant d'être retiré de la vente au bout de deux semaines. C'est l'un des accidents industriels les plus coûteux de ces 20 dernières années, il n'est donc pas étonnant que Sony ait décidé de fermer les volets. On ne sait pas encore combien d'employés seront licenciés. A.
Just Cause : la revanche
L'un des deux créateurs de la franchise Just Cause, Christopher Sundberg, vient de partager les premières photos d'écran du projet qu'il monte dans son nouveau studio Liquid Swords. Bon, pas grand-chose à en dire, on voit juste un bout de ville rappelant vaguement New York. Mais ce jeu (dont on ne connaît pas encore le nom) se veut ambitieux. PCGamesN rapporte qu'il s'agira d'une « histoire de vengeance » en monde ouvert, de qualité « triple A », utilisant l'Unreal Engine 5, et évoque une atmosphère moins fofolle que les Just Cause, plus proche des GTA et des Mafia. L'ami Christofer veut réaliser le tout avec une équipe de moins de 100 personnes, car il est persuadé qu'il peut réussir à « simplifier » le développement des jeux vidéo. Oui, ça finira probablement avec 372 personnes dans le studio et quatre ans de retard, mais saluons quand même son optimisme. A.
Le Steam Deck 2, on verra plus tard
Valve a sorti son premier Steam Deck en 2022, puis le Steam Deck OLED en 2023, mais ne vous attendez pas à un modèle en 2024 (ni même, peut-être, en 2025). Deux de ses créateurs, interviewés par le site Review.org, affirment qu'ils ne veulent pas de cycle de sortie annuel, comme Apple le fait par exemple avec ses gadgets : « Nous n'allons pas faire d'améliorations mineures chaque année. De notre point de vue, ça ne serait pas juste envers les consommateurs de sortir un produit un tout petit peu meilleur alors qu'ils viennent juste d'acheter l'ancienne version. » Amen. Ils ont bien sûr un Steam Deck 2 en chantier, mais d'après eux, la technologie qui leur permettrait d'obtenir les performances souhaitées n'est pas encore prête. A.
Ce jour où tout a basculé
Vous vous souvenez de cette carte Pokémon à 50 centimes que vous vouliez acheter en 1998 ? Au dernier moment, votre mère vous a dit « non Corentin, tu ne dépenseras pas ton argent de poche dans ces bêtises ! » Aujourd'hui, cette même carte se vend 12 000 dollars sur les sites spécialisés. Frustrant. Mais cela pourrait être pire. Vous pourriez être feu Paul Otellini, qui a monté une opération de rachat de NVIDIA pour 20 milliards de dollars en 2005, lorsqu'il était patron d'Intel. Le New York Times, qui vient de sortir le scoop sur cette vieille histoire jusqu'alors inconnue, rapporte que son conseil d'administration de l'époque a torpillé l'idée, et a préféré qu'Intel développe son propre GPU – le Larabee, qui fut une catastrophe industrielle. Une décision brillante de ces grands seigneurs du capitalisme, puisqu'aujourd'hui, NVIDIA vaut 3000 milliards de dollars, soit trente fois plus qu'Intel. A.
Satisfactory aura probablement un DLC. Mais pas pour tout de suite : les développeurs de Coffee Stain disent qu'ils en sont, pour l'instant, à réfléchir à ce qu'il pourrait mettre dans cette future extension payante. A.
Fouinette lance Leak. C’est très efficace.
Quelqu’un chez Game Freak risque de se faire taper très fort sur le bout des doigts. Le développeur japonais, spécialisé dans le trafic d’animaux et leur dressage au combat par des enfants soldats (oui, voilà : Pokémon) a vécu une toute petite fuite de données en août, si minuscule qu’elle est nommée le « Teraleak ». Se baladent donc dans la nature : des infos sur les jeux passés et à venir, des designs de Pokémons non retenus (Sado-Masoux n’a pas passé la validation), un nom de code pour la Switch 2, ce qui nous fait une belle jambe, des détails sur les séries et film à venir pour la licence, etc. Bref, découvrir que Game Freak envisage un énième Pokémon : Saumon et Gris taupe et à peu près tout ce qui peut essorer le plan d’épargne des enfants n’a rien de nouveau, le fait que les données personnelles d’employés ont été volées au passage est beaucoup plus embêtant. La rédaction de Canard PC va, bien évidemment, éplucher tout le contenu de cette fuite, fichier par fichier, pour vous tenir informés (non). P.
Premier novembre 2024, c’est vendredi, le soleil se lève, vous buvez votre café et ouvrez votre Canard PC. J’ai une bonne nouvelle : dans à peine 12 jours, The Rise of the Golden Idol, la suite de The Case of the Golden Idol, sera disponible. Cette joie, ce moment de béatitude, souvenez-vous que c’est nous qui venons de vous les donner. P.
Gazon maudit
Globant est une entreprise qui « réinvente le digital » avec une approche qui, je cite, « apporte de la valeur ajoutée à une plus grande opportunité ». Ah oui, ils accueillent aussi l’IA à bras et portefeuilles ouverts, comme le démontre cette traduction. Invitée sur leur chaîne YouTube, Pascale Clarac s’est sentie en confiance, entre gens sérieux qui font du branding, pour s’interroger sur « Des créations porteuses de sens pour se démarquer dans le jeu vidéo ? » (ne riez pas). Elle a rassuré sur l’IA, dont elle « ne pense pas qu’elle va remplacer les gens » dans les studios, mais aider pour qu’ils « soient là pour des trucs hyper qualitatifs et gagner du temps sur des choses qui soient moins importantes ». Son exemple ? Les décors environnementaux, l’herbe, les arbres, etc. « C’est beaucoup de temps passé pour pas grand-chose », estime-t-elle, et les concernés pourront « se focus sur les habits du personnage ou des trucs comme ça ». Le hic ? Pascale Clarac est directrice du business development de Don’t Nod depuis 2023, et ses déclarations ont entraîné une volée de bois vert de la part des artistes environnementaux d’un peu partout. C’est pas un move hyper quali ça, Pascale. P.
Marche ou grève
Hier, plus de 700 salariés d’Ubisoft (sur les 4 000 qui travaillent en France) se sont mis en grève, selon le STJV – ils étaient à peu près le même nombre en février dernier au cours d’un premier mouvement social. Ils contestent notamment la décision de la direction d'imposer une présence au bureau trois jours par semaine (contrairement à ce qui avait été promis à des salariés récemment embauchés), et demandent une hausse des salaires et un vrai dialogue avec la direction, laquelle n’a pas encore répondu pour l’heure. La grève est prévue jusqu’à jeudi, et le message pour la direction d’Ubisoft est très clair : la balle est dans votre camp. ER.