Syndicats de force majeure
C'était le bon moment : les cadres dirigeants étaient en vacances aux Maldives, les grands patrons sur leurs yachts (sauf le démissionnaire Bobby Kotick, occupé par sa cure annuelle en Suisse durant laquelle les employés d'une clinique secrète réajustent chaque été le masque en plastique qui dissimule son origine extraterrestre). Les petites mains du jeu vidéo, échaudées par le jeu de massacre des dix-huit derniers mois, ont donc profité de la fin juillet pour se syndiquer en masse. Quelques jours seulement après que 240 employés de Bethesda ont formé leur syndicat (le premier dans une entreprise acquise lors les grands rachats de Microsoft), 500 de ceux de Blizzard leur ont emboité le pas. Une bien belle initiative, même si le nom du syndicat de Blizzard, WoW Gamemaker's Guild, montre que ces gens-là passent décidément trop de temps à lire de la fantasy, mais bon, on a évité « les elfes de la nuit pour la justice sociale », c'est déjà ça. LFS.
Annapurna, mon amour
Quand Jason Schreier, de Bloomberg, sort un scoop (tous les trois jours), c’est rarement pour annoncer une bonne nouvelle. Le dernier en date ne fait pas exception à la règle, puisqu’on apprend que tous les employés d’Annapurna Interactive ont démissionné, quelques jours après ses dirigeants. Le retour d’Hector Sanchez (membre de l’équipe fondatrice) à la tête d’une division jeux visant — aussi — des titres AAA en plus des titres indépendants, n’aura donc pas convaincu. La filiale était en réalité en pourparler avec la big boss d’Annapurna, Megan Ellison, pour faire scission et devenir une entité indépendante, sans succès. C’est un petit séisme pour les studios indés partenaires, mais si toute cette équipe annonçait, un de ces quatre, la création d’une nouvelle boîte nommée « Annapourni Games » ou « Onipourna Games », on ne tomberait pas de nos chaises. P.
L’éditeur Nexon est un papa fier. Le Dave the Diver, de Mintrocket s’est écoulé à 4 millions de copies et, surtout, il a obtenu un 9 sur 10 d’ackboo dans nos colonnes (ce qui, pour un jeu sans canon antichar 7,5 cm PaK 40, équivaut à un 12 sur 10). Nexon transforme Mintrocket en filiale (contrôlée à 100 %), et l’ado indépendant a donc sa propre chambre au-dessus du garage. P.
Ne me mens pas, je t’ai Crew
À l’heure où j’écris ces lignes, une des plus belles affaires de l’année est disponible sur Steam. Mais à l’heure où vous lisez ces lignes, si vous êtes resté un fidèle du papier, vous l’avez probablement déjà dans l’os. Jusqu’au 23 septembre, The Crew 2 est à… 1 euro. Cet euro est là, dans votre poche, il ne sert à rien et va probablement disparaître dans un kebab gras dégueulasse. 98 % de réduction, c’est bien beau, mais si c’est pour se retrouver avec un jeu de course sympa — et qui s’est bien bonifié avec le temps — qui finira par fermer ses serveurs et devenir injouable (exactement comme son prédécesseur depuis le 1er avril), non merci ! Sauf que son éditeur vient de promettre de le garder en vie longtemps et, surtout, de sortir un patch offline pour ne pas rééditer son erreur. Il suffit donc de lui faire confiance. Cet éditeur, qui comprend les joueurs, c’est Ubiso… ah, bordel, je savais bien qu’il y avait un piège. P.
Délicatesse d’initié
On pense les pontes déconnectés des réalités des employés, et, en fait pas du tout. Regardez Chris Deering, ancien président de Sony Europe, qui affirme au micro du podcast de Simon Parkin que les vagues de licenciements ne lui semblent pas guidées par l’appât du gain et que virer des gens « est probablement très douloureux pour les managers » (émoticône chaton qui pleure). Que les mis à la porte se rassurent, il ne pense pas qu’être développeur « soit synonyme de pauvreté ou de frein à vie. C’est toujours là où il y a de l’action, c’est juste comme durant la pandémie ». Que faire alors ? « Prendre quelques jours… trouver comment vous en sortir, conduire un Uber ou autre, trouver un endroit bon marché où vivre et aller à la plage pendant un an. Mais sans perdre le fil de l’actu, car une fois que vous aurez quitté le train, ce sera beaucoup plus difficile ». Blague à part, il y explique surtout que les studios sont coutumiers de ces cycles depuis longtemps, doivent surtout arrêter d’embaucher au pif, et financer chaque jeu avec le précédent. Il va falloir travailler le tact papy Chris, le tact. P.
La poule Hopoo
Le studio Hopoo Games (Risk of Rain & Risk of Rain 2, avant de revendre la licence à Gearbox) n’est plus, et leur prochain projet Snail disparaît avec lui. Encore des employés qui vont voir leurs revenus s’écroul… comment ça multipliés par 10 ? Eh oui, car il ne s’agit pas d’une fermeture pour défaut de paiement, mais de ce qu’on appelle dans le milieu une « Campo Santo ». Comme le studio américain avant lui, une partie de l’équipe d’Hopoo est avalée par Valve pour travailler en interne sur… Eh bien aucune idée, peut-être bien sur rien d’ailleurs, qui sait chez Valve ? Bon, je suis mauvaise langue, car Campo Santo a mis à jour la date de sortie de In The Valley of Gods sur Steam : décembre 2029 (authentique). P.
Le baiser de la mort
Enfin ! Enfin l’industrie va cesser de croire aux sirènes de l’IA, comme elle a (un peu) cessé de croire aux cryptomonnaies, à la blockchain et aux NFT de singes. Pour réussir ce miracle, il aura fallu un homme, un seul, un héros qui se lève dans l’ombre : Peter Molyneux. Son prochain jeu, Fabl… euh, Masters of Albion, annoncé à la soirée d’ouverture de la Gamescom, où il a mentionné en boucle Black & White, Dungeon Keeper et Fable — mais, étrangement, pas Curiosity, Godus, ni Legacy —, est un god-game (ceux avec une main qui attrape les personnages par le col) et sortira sur PC. Conséquence ? Peter a une actu, quelque chose à vendre et il parle. Sa dernière sortie, sur le site eurogamer qui demande à divers développeurs où sera le jeu dans 25 ans, prophétise deux choses : Hollywood va être de plus en plus intéressé par le jeu vidéo et l’IA va tout révolutionner, permettant même à tout un chacun de créer un jeu entier avec un simple prompt. La boussole inversée Molyneux a donc donné le nord, j’espère que tout le monde sait désormais où aller. P.
Quelques jours après l’ouverture aux mods de Baldur’s Gate 3, trois millions ont étés installés. Ils sont disponibles via un navigateur ingame, ce qui est une très bonne nouvelle, car une fois les mods « Karlach BDSM » et « Astarion dick enlarger », dégagés par l’équipe belge de Larian, il en reste au moins cinq non-sexuels. C’est énorme. P.
Prendre un enfant par la main (invisible)
Lors de la Roblox Developers Conference des 6 et 7 septembre derniers, tout un tas d’adultes s’est réuni pour réfléchir ensemble aux meilleurs moyens de soutirer de l’argent aux enfants. Cette noble cause, pour être efficace, doit se fixer des objectifs clairs. Voilà qui tombe bien, car, dès le discours d’ouverture, le PDG et cofondateur David Baszucki a fixé un cap, modeste et raisonnable : passer de 80 millions de joueurs quotidiens à… un milliard (!), et glaner au passage 10 % des revenus mondiaux liés au jeu vidéo. Au milieu d’annonces de nouveautés à venir, comme des outils de chat ou de partage de musique, David Baszucki a tout de même voulu rassurer les parents inquiets. Enfin, au moins ceux qui s’inquiétaient que leur progéniture ne puisse pas dépenser tout son argent de poche : Dès 2025, il sera possible de vendre des marchandises à partir des jeux, et les prix pourront être en vrais brouzoufs (avec une dîme de 30 à 50 % pour Roblox). P.
Le nom d’Andrew Greenberg ne vous dit peut-être rien et c’est bien normal, les jeunes ne respectent plus leurs aînés et ne savent plus d’où ils viennent, ma bonne dame. Sachez qu’il s’agit d’un des deux créateurs de Wizardry, l’une des séries qui avec Ultima a plus ou moins inventé le jeu de rôle sur ordinateur tel qu’on le connaît aujourd’hui. Et que ce monsieur vient de nous quitter. Alors un peu de respect. LFS.
Des laids et des LED
Je suis au regret de vous informer des conclusions de l’étude menée par Andy Chung et ses copains du National Bureau of Economic Research, qui sont formelles (et dont, soyons honnêtes, on se doutait un peu) : il existe bel et bien une corrélation négative entre apparence physique et temps passé devant des jeux vidéo. Que ce soit chez les ados ou les adultes, les sujets aux physiques les plus avenants sont ceux qui jouent le moins et, à l’inverse, les plus répugnants y consacrent le plus grand nombre d’heures hebdomadaires. On y apprend également que les laiderons ont en moyenne moins d’amis, état également corrélé au fait de jouer davantage. Que nos lecteurs se rassurent, il ne s’agit que d’un papier de travail qui n’a pas encore passé l’épreuve de la peer review, il leur reste donc de l’espoir. LFS.
Phil Spencer a fait des erreurs, figurez-vous. Lors d’un entretien donné à la PAX West, il explique avoir, comme un gros couillon, refusé de signer Destiny et Guitar Hero, convaincu que ces jeux ne marcheraient pas. Mais il affirme n’avoir aucun regret car « ces choses-là arrivent » et vous savez quoi ? Il a bien raison. Après tout, Gallimard avait bien refusé d’éditer Proust, qui a pourtant été élu GOTY par l’Académie Goncourt en 1919. LFS.
IA, IA, Shub-Niggurath !
Ça semble à peine croyable, mais une bande de petits bricolos de Google Research (il faut savoir que le grade de petit bricolo, chez Google Research, vous donne accès à environ 75 millions de dollars de matos) a réussi à créer un « moteur de jeu » capable de faire tourner Doom sur un réseau de neurones. Pour résumer, ils ont entraîné une IA à jouer à Doom puis laissé une autre IA observer cette dernière, afin qu’elle apprenne à quoi ressemble le jeu ainsi que le lien entre inputs au clavier et action à l’écran. Résultat : un pseudo-moteur sur lequel il est possible de jouer à Doom à 25 images par secondes et où, bien qu’aucune donnée de jeu ne soit directement utilisée, la géométrie des niveaux et le comportement des ennemis est presque cohérent. C’est si bluffant que je vous encourage à aller voir gamengen.github.io pour en apprendre davantage. LFS.
La concorde est rompue
Il s’agit probablement d’un record mais vu l’état de l’industrie en ce moment je n’ose même pas vérifier : Concord, le hero shooter de Firewalk Studios, a fait un four si abominable que Sony, rougi par la honte et le visage couvert de cendres, a décidé que ses serveurs fermeraient le 6 septembre 2024, c’est à dire deux semaines pile après la sortie du jeu. Les acheteurs seront bien sûr intégralement remboursés, car payer plein pot un shooter multi dont les serveurs ferment au bout de quinze jours (et n’ont jamais dépassé les 700 joueurs simultanés sur Steam) serait tout de même un peu difficile à avaler. Des experts très sachants vous expliqueront qu’il s’agit d’une preuve supplémentaire que le marché des jeux en ligne est saturé. En ce qui me concerne, je me garderai bien de me prononcer, me contentant de faire remarquer, avec l’air mystérieux d’une diseuse de bonne aventure, que « quinze jours » se dit en anglais « fortnight ». LFS.
Ubi désorbité
Si vous pensez que Star Wars Outlaws n’est pas un jeu exceptionnel, qu’il ne s’agit que d’une ubisofterie de plus mais en version interstellaire, désolé de vous le dire, mais vous vous fourrez le sabre-laser dans l’œil jusqu’au coude. Outlaws a en effet, et peu de jeux peuvent en dire autant, fait plonger l’action de son développeur/éditeur a son plus bas niveau décennal. Enfin, pas le jeu lui-même, mais les critiques (ces salopards !) qui ont, vous ne le croirez jamais, dit qu’il ne s’agissait que d’une ubisofterie de plus, mais en version interstellaire. Et maintenant les actionnaires pleurent, vous êtes fiers de vous ? LFS.
Mini-test : Age of Mythology Retold
C'est bien connu, s'aimer ce n'est pas se regarder l'un l'autre mais regarder dans la même direction. C'est pourquoi le mariage entre Bethesda et Microsoft était un mariage d'amour : tandis que le premier ressort Skyrim tous les deux ans, le second nous pond son remaster annuel d'un épisode des Age of. Cette fois-ci, c'est Age of Mythology (2002) qui, après l'Extended Edition (2014), débarque en version Retold (2024). En plus d'un bon coup de polish visuel, cette nouvelle version apporte quelques changements de taille au gameplay, notamment la possibilité d'utiliser chaque pouvoir divin plusieurs fois durant une partie. On trouve aussi de nouvelles cartes, scénarios et upgrades technologiques, ainsi que la promesse de contenu supplémentaire dans l'avenir, notamment un nouveau mode de jeu solo et coop baptisé « Arena of the Gods » et de futures extensions payantes. Tout cela est bel est bon, AoM reste l'un des meilleurs STR du début des années 2000 et les nouveautés renouvellent intelligemment le gameplay. Reste que bon, 30 € pour AoM… LFS.