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Gears of War 4
Visitez la vallée des rouages
C’est un beau matin d’octobre. Un soleil timide (ou est-il simplement pudique ?) réchauffe paresseusement les rues grises et froides de la capitale qui sort du lit. Assis à mon bureau, je rêvasse. À peine ai-je le temps de m’abîmer dans la contemplation du frémissement automnal des arbres roussis, que la dure réalité me rattrape. « GRUGRUUUUUU », hurle le langage corporel du bodybuilder stéroïdé sur mon écran. « VIENS ON VA CASSER DES TRUUUUUUCS ! » D’accord monsieur.
Gears of War est une série qui ne rigole pas. Ses héros (les vaillants rouages de la guerre) sont musculeux et énervés, ses monstres dégueulasses, visqueux et méchants, et ses armes font rarement dans la dentelle, préférant jouer à « bouteille de Coca + Mentos » avec les organes internes de leurs malheureuses cibles. Considéré par beaucoup comme le patriarche de la famille des TPS modernes qui balancent le joueur de couverture en couverture (alors qu’il s’agit en vérité du méconnu Kill.Switch, sorti en 2003), Gears of War trimbale depuis dix ans ses armoires normandes à voix grave et ses larves de locustes purulentes sur Xbox 360. La petite nouveauté, c’est qu’Epic Games a revendu sa marque à Microsoft, qui a depuis refilé le bébé à The Coalition, jeune studio déjà en charge du remaster du premier épisode sorti en mars dernier. À eux maintenant de prouver qu’ils ont les épaules pour bosser sur la série avec leur premier épisode inédit.
Ready Steady GoW. Le premier gros combat de Gears of War 4 démarre sur les chapeaux de roues et met le joueur aux prises avec un impressionnant béhémoth gauche et pestilentiel : le magasin de Microsoft. Le téléchargement des quatre-vingt (!) gigas pose apparemment de gros problèmes à la plateforme de l’éditeur qui a refusé pendant plusieurs jours de correctement choper le jeu. Une fois cette première épreuve passée, il faut se fader un prologue absolument infâme au gameplay dépassé et au level-design sans imagination, histoire de nous rappeler que Gears of War appartient au passé. Quelques dizaines de minutes plus tard, on découvre enfin J.D. Fenix (fils du héros des épisodes précédents), prêt à botter des culs de larve plus de vingt ans après les chamailleries de son papa avec la reine des vilains locustes. Malheureusement, Gears of War 4 va jouer les allumeurs et refuser de pleinement se dévoiler pendant quelques heures de plus puisque la totalité du premier acte du jeu oppose nos fringants héros (chouette casting par ailleurs, comme souvent dans la série) à des hordes de robots. Et comme le dit notre grand sage Netsabes, « c’est pas drôle de tuer des robots, ça saigne pas ». Une maxime d’autant plus pertinente ici puisque la série a quand même fait sa réputation en proposant toutes les dix minutes des remakes de publicités pour gel douche où l’eau est remplacée par des kilolitres de sang et des hectotonnes de bidoche.
Gore de rire. Il faudra donc attendre le deuxième acte du jeu pour enfin rejouer à Gears of War et faire exploser ses ennemis dans des feux d’artifice carmins et poisseux. On retrouve alors ses marques, malgré une ambiance étonnamment plus sérieuse : l’idiotie caractéristique des épisodes 2 et 3 semble diluée dans cet épisode et, entre nous, c’est un peu triste. Gears, c’est avant tout des abrutis finis qui secouent leur baïonettes-tronçonneuses en hurlant « GRUGRUUUUU ON VA VOUS FAIRE PÉTER LES VEINES DU DERCHE »Note : 2, c’est ce môme un peu idiot à la maternelle qui fait une bite en pâte à sel et court la montrer fièrement à tous les adultes. On perd un peu de ça dans ce quatrième épisode. Il y a toujours des petites vannes ici ou là, des armes idiotes et géniales (mention spéciale au lance-disques et au merveilleux Dropshot accompagné de sa petite ogive qui survole le champ de bataille avant d’aller s’enfoncer et exploser dans la terre – ou une colonne vertébrale) mais le côté décomplexé des anciens épisodes s’efface un peu trop. Il est timide, ce Gears 4, il effleure chacune de ses chouettes idées sans jamais vraiment plonger dedans. C’est d’autant plus dommage qu’il multiplie les expérimentations, pour le meilleur (un passage à moto qui en met plein la gueule) mais aussi pour le pire (ces infâmes phases de horde / tower defense sans grand intérêt).
Note 2 : Only in Gears of War 2, éditions Microsoft Games, 2008
Note 2 : Only in Gears of War 2, éditions Microsoft Games, 2008
Locuste entre deux chaises. Et pourtant, malgré son manque de fantaisie (tout relatif, ça reste Gears of War), on avance dans l’histoire sans déplaisir à mesure que le jeu retrouve son rythme de croisière. On tue, on étrille, on explose, on ratiboise, comme on le fait depuis dix ans, en posant le cerveau sur la table de chevet et en rigolant bêtement. De toute façon, le fan de la série vous dira que la campagne solo n’est qu’un amuse-gueule pour le gros morceau du jeu : son multi. Et ici, absolument rien à déplorer : la partie multi est sacrément fournie, bourrée de modes de jeu, variantes et autres options de personnalisation, même si la multiplication des systèmes de cartes, primes et autres emblèmes à débloquer lui donnent de faux-airs de free-to-play moderne un peu cracra. Le dernier point sur lequel j’aimerais m'attarder , le plus important, concerne la partie technique du jeu. Gears of War 4 est absolument superbe, avec ses décors hallucinants, ses éclairages impeccables et ses feuillages splendides animés à soixante images par seconde (c’est super important, taisez-vous, j’ai raison). Enfin, sur Xbox One. Parce que sur PC, le résultat est catastrophique. Malgré un bon point pour la pléthore d’options graphiques, le titre se voit handicapé par des bugs inexcusables en 2016. Sur trois configurations différentes, on a eu pêle-mêle un tiers des textures qui ne se chargent pas et restent floues, des éclairages qui pètent un câble toutes les dix secondes et, plus fort encore, la désactivation de la touche « avant » pendant deux chapitres entiers. Sans manette à proximité, le malheureux joueur devra alors marcher en crabe pendant une quarantaine de minutes avant de récupérer toutes ses facultés motrices. C’est d’autant plus triste que, toutes options à fond, le titre tourne comme un charme même sur des configurations modestes.